Parution : 11/2012
La jeune Bonnie rencontre un drôle de bonhomme hirsute et bariolé dont la chevelure longue et rebelle l’intrigue au plus haut point. Quels sont ces cheveux fous ? Elle découvre alors un lieu formidable où nichent des oiseaux colorés qui s’envolent de partout. Dans l’épaisse frondaison capillaire veillent les tigres, les lions et d’insouciants paresseux lourds de leur paisible nonchalance. Des explorateurs cherchent leurs chemins alors qu’au cœur de la toison revêche résonnent toutes sortes de musiques et se pratiquent de folles danses. Une foule de ballons multicolores admirent le vent qui balaye cette végétation sauvage. Ils sont comme les chevaux de ces manèges où l’artifice donne une agréable sensation de mouvement. Ils se mirent dans les flots organiques où vogues d’impressionnants galions pirates. A quoi bon mettre de l’ordre dans un endroit si joyeusement désorganisé?
Neil Gaiman et Dave McKean font d’une chevelure des aventures, idéalement située pour ne rien rater des rêves et poste d’observation inégalé de la réalité. Les cheveux fous sont, de leur structure microscopique au conglomérat mouvant de la crinière, le témoin silencieux de l’histoire de l’énergumène qu’ils coiffent. En lui donnant la parole, les auteurs ouvrent la boîte de pandore d’où s’échappent des mondes colorés et vivants où la matière joue le rôle central. La multiplicité des techniques employées sur chaque double-page donne l’impression de fresques où s’entremêlent peintures, photos, collages et illustrations numériques. Comme la tignasse qui par la multitude de ces aspects peut devenir un outil de l’affirmation de soi et suggérer au quidam un fragment de la personnalité de celui qui l’arbore. Ces cheveux fous les symbolisent tous, longs, courts, gras, secs, foncés ou clairs. Car la variété et la différence des tignasses donnent à l’aventure de Bonnie tout son charme.
Ce superbe ouvrage est nécessaire aux adultes solidement adossés aux conventions et aux idées réactionnaires. Il sera un bon compagnon pour tous ceux qui s’amusent encore devant un monde touffu et bigarré.
Alain Lamourette
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