Parution : 06/2013
C’est pantalon aux chevilles, royalement posé sur le trône à feuilleter distraitement la presse féminine, qu’Aurélien Ducoudray découvre le pot aux roses. Un convoi humanitaire pour les réfugiés de Bosnie est organisé par Arlette, une prof du collège à deux pâtés de maisons de chez lui. Une chance à ne pas rater pour un photographe de presse quotidienne régionale, rompu aux manifestations locales d’envergure relative. Il convainc son patron de la pertinence du sujet et de l’impact pour « Le cri du peuple » et obtient 15 jours de congés pour faire ce grand reportage. Usant de ses capacités de persuasion et profitant d’une discussion sportive sur la forme des poteaux qui ont tant coûté au football hexagonal, il obtient quand même des pellicules. Il rejoint le convoi de l’inusable Arlette, joyeux et déterminé trublion qui va renverser toute les barrières du Limousin à la Bosnie. Attention aux yeux, qui ne risquent pas de prendre froid avec ce petit bout de femme ! Ils seront six, deux élèves infirmiers, un étudiant en médecine et un ancien élève d’Arlette. Sur place, ils rejoindront un médecin acariâtre et une jeune traductrice à l’humour potache. Ensemble, ils prendront de face les stigmates d’un pays encore en guerre il y a vingt ans. Génocides et charniers, déplacement de populations et camps de réfugiés, détresses humaines aux mains des mafias et des politiques véreux, des vacances dont Ducoudray se souviendra longtemps.
Clichés de Bosnie raconte le reportage photographique d’Aurélien Ducoudray réalisé en 2004. En 2011, François Ravard marche dans ses traces et réalise le dessin de cette aventure humaine bouleversante. A la mine de plomb et au lavis gris, il donne un rendu minéral et du relief aux tournures comiques et tragiques que prennent les événements. Car la force de cet album réside dans sa capacité à produire tant le rire que l’émotion et l’indignation. Difficile de ne pas cerner l’optimisme salvateur du personnage d’Arlette et de comprendre à quel point celui-ci est essentiel à la réussite du convoi pendant tant d’années. Car, loin des ONG, Arlette se mobilise avec quelques bénévoles qui partent comme ça, avec leurs pitres et leurs couteaux. A croire qu’un petit groupe de personnes déterminées peuvent changer les choses. Les deux auteurs ne manquent pas de revenir sur les événements historiques, pour ne pas perdre le lecteur. Un supplément photographique en fin d’album présente une sélection de ces fameux Clichés de Bosnie.
Une aventure humaine qui sait mettre en lumière ce qu’il reste d’espoir dans un pays dévasté par la guerre.
Alain Lamourette
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