Parution : 01/2013
Alors qu’il est fortement préoccupé par la publication de son album sur Pierre Goldman, militant d’extrême-gauche qui a versé dans le banditisme avant d’être écrivain en prison et assassiné dans des circonstances douteuses à sa libération, Emmanuel Moynot s’offre une parenthèse musicale avec ses potes des Hurlements d’Léo. Le groupe bordelais accueille parmi eux ce trublion qui scrute et note chacun de leurs travers, chacune des humeurs dominantes, les petits couacs, les grandes claques et l’aventure de ce troupeau de rock, comme on l’entendait aux belles heures du rock alternatif et indépendant des années 80. Cet état d’esprit, très présent dans les compostions des Hurlements, est à peine nuancé par l’influence de la chanson à texte francophone. C’est ce qui intrigue Moynot, lui-même musicien dans un des nombreux « side project » des Hurlements. Il invite le lecteur à prendre place dans le bus de tournée, en coulisse, à la table des Hurlements, durant la tournée Bordel de luxe. Six mois sur les routes, de petites scènes en grands rassemblements européens…
Cet album relate l’expérience d’Emmanuel Moynot au sein du groupe des Hurlements d’Léo. Ce parti-pris peut décontenancer le lecteur qui pourrait s’attendre à une bande dessinée sur le groupe. On y trouve quelques infos, des moments de vie, des moments – peut-être trop furtifs – d’introspections et de réflexions des membres du groupe, mais aussi des petits désagréments et des coups de gueules qui prêtent facilement à sourire. Kébous, un des deux chanteurs, y tient une place très importante, pour ne pas dire la place la plus importante après l’auteur. Le lecteur qui suit le groupe depuis ses débuts restera un peu sur sa faim, car cet album met en images ce qu’il aura déjà pu partiellement saisir lors des concerts où en décortiquant l’exigence musical de ce groupe chaleureux et généreux. Il en apprendra bien plus sur Emmanuel Moynot, qui relate l’expérience collective d’un auteur de BD qui a l’habitude de travailler seul. Il va confronter ses représentations enthousiastes de l’archétype groupe de rock à la réalité de la vie en collectivité, sans polir le discours ou cacher ses affinités.
Un album sans concession qui, à l’instar des Hurlements de Léo, n’est pas toujours là où on pourrait l’attendre.
Alain Lamourette
Poster un Commentaire