Pico Bogue est sans conteste une des séries d’humour à suivre depuis quelques années déjà. La complicité entre Dominique Roques et Alexis Dormal n’y est certainement pas pour rien, leur lien de mère-fils non plus. Nous vous proposons donc de découvrir ces deux auteurs fort sympathiques.
Chronique du Tome 5
Bulle d’Encre : Bonjour Dominique et Alexis. Pouvez-vous nous raconter comment est née la série Pico Bogue ?
Dominique Roques : J’ai toujours trouvé les dessins d’Alexis épatants. Quand il était petit, il dessinait des Schtroumpfs maigres qui bougeaient sans même être animés ! J’ai eu envie que les autres – et en premier lieu des éditeurs – découvrent son talent (tout à fait la mère criant : « Venez voir ! Mon fils est génial ! »). Je n’ai donc commencé à écrire que pour faire connaître Alexis. Mais je me suis prise au jeu, j’ai beaucoup travaillé, et Thomas Ragon, notre éditeur, ne m’a pas exclue.
Alexis Dormal : Nous avions envie d’inventer un petit garçon, dans l’esprit de Calvin et Hobbes, Mafalda ou les dessins d’humour de Sempé.
BDE : Dominique, vous êtes-vous inspiré de votre propre expérience de maman ou également de votre enfance pour écrire les gags de cette série ?
DR : J’utilise tout ce qui est à ma portée dans ma vie… dans ce que j’entends autour de moi et dans les médias… dans ce que je lis… dans mes relations avec mes fils, ma famille, les personnes que je croise…
BDE : Vous avez déclaré qu’il vous serait difficile de travaillez avec un autre dessinateur qu’Alexis. Votre carrière de scénariste est donc intimement liée à celle de votre fils ?
DR : Quand je me trompe dans mon travail d’écriture, Alexis peut me montrer la direction qu’en réalité je voulais prendre. Et il le peut parce qu’il me connaît bien. Il devine vite ce que j’ai dans la tête. Cela lui permet aussi d’inventer ses propres scénarios : la musique est la même.
BDE : Comment travaillez-vous l’un avec l’autre ?
DR : J’écris un dialogue avec peu d’indications. Alexis le lit. Soit il me renvoie dans mon bureau si ce dialogue est inabouti, soit il aime et il esquisse une mise en scène. A mon tour je fais mes critiques. Et quand nous avons fini de nous chamailler, nous comparaissons devant le tribunal de Jérôme, mon autre fils, qui donne son verdict…
AD : …Puis nous attendons le verdict de notre éditeur ! Et donc, nous ne gardons pas une histoire qu’un de nous quatre n’aime pas. Concernant le dessin lui-même, je le dessine seul, mais Dominique a l’œil, et un vrai sens du jeu d’acteur. Donc nous nous concertons souvent pour que, par exemple, les expressions des personnages soient les plus justes possibles.
BDE : Après cinq albums de Pico Bogue, pensez-vous avoir encore de nombreuses aventures de ce personnage à proposer aux lecteurs ?
DR : Il faut demander à Pico.
AD : Et Pico m’a répondu « oui ».
BDE : Alexis, vous qui avez une expérience dans le dessin animé, pensez-vous que Pico Bogue puisse être adapté en dessin animé ? En auriez-vous envie ?
AD : La société de production « Les Armateurs » qui a, entre autres, produit le film Kirikou, a déjà réalisé le pilote d’une série d’animation sur Pico Bogue. Je craignais d’être déçu… j’ai été scotché, scié par un tel résultat. Ils ont réinventé une technique d’animation extraordinaire, tout en préservant l’aspect aquarellé. Le scénario est fin, vif et accessible aux tout petits, les voix sont à tomber par terre (ce qui m’est vraiment arrivé, quand j’ai entendu les voix de Pico et Ana Ana, doublés par de vrais enfants), et la réalisation est impeccable. Bon… hé bien oui, j’aime ! J’ai vraiment eu la sensation de voir mes propres aquarelles prendre vie. Les Armateurs ont réussi le pari de rester fidèle à la série, tout en gagnant leur liberté.
BDE : Peut-être d’autres envies pour des projets BD différents ?
DR : Ana Ana et Pico trouvent cette suggestion scandaleuse. Quant à moi…
AD : Oui, d’autres envies, dans un style graphique qui ne sera pas totalement humoristique cette fois, mais cela se fera parallèlement à Pico. J’ai toujours envie de poursuivre mon petit bonhomme de chemin à ses côtés.
BDE : Merci à vous !
DR : C’est moi qui vous remercie.
AD : Merci !
Propos recueillis par Nicolas Vadeau.
Interview réalisée le 7 décembre 2011.
© Dargaud/Roques/Dormal
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