Parution : 02/2012
Dans l’anglican royaume de Grande-Bretagne du XIXème siècle, le jeune Percy Bysshe Shelley, étudiant de la très sérieuse université d’Oxford, fait grand bruit avec la publication de son Traité de la nécessité de l’Athéisme. Cela pourrait sembler une mauvaise farce, sauf qu’outre l’adresse au Vice-Chancelier, autorité dirigeante de l’institution, Shelley a cru bon d’informer l’ensemble des évêques du Royaume de son athéisme forcené et de la vertu de celui-ci pour l’humanité. Loin d’être refroidi par son éviction de l’université, loin d’être contrarié par son expulsion du domicile paternel pour n’avoir pas accepter de renier cet essai, le jeune poète, en visite chez ses sœurs rompues au désaveu de ses frasques littéraires, surseoira à leur courroux en enlevant littéralement la jeune Harriet. Il ne manquera pas de respecter l’usage en allant directement chez son père, notable d’une bourgade rurale quelconque, pour demander sa main en lui cédant pour dot la totalité de sa solde. Le mariage, célébré en toute confidentialité, avec pour témoin un inconnu choisi au hasard d’une taverne et un beau-père provisoirement aux anges, n’empêche pas le volubile poète d’aller vers d’autres desseins. La politique l’exalte et le royalisme l’insupporte, son esprit de liberté l’emmène vers d’autres rencontres tant intellectuelles que charnelles…
A travers cet album retraçant la vie de ce poète – à posteriori l’un des plus importants de sa génération, ami de Lord Byron et de William Godwin – David Vermeulen et Daniel Casanave s’intéressent de près à la naissance du romantisme anglais. La coloration de Patrice Larcenet rend parfaitement la vitalité et la fougue du personnage et de ses aventures. Le dessin vif et la mise en scène leste de Casanave appuient parfaitement l’insouciance du propos et cette poursuite effrénée de l’aventure romanesque. Le scénario de Vandermeulen respecte lui parfaitement l’histoire de Percy Shelley, en appuyant sur le décalage du jeune homme vis-à-vis de son époque. La réussite de cet album est de rendre aux yeux du lecteur, dans une époque sinistre, un jeune homme résolument moderne dans sa farouche détermination à bousculer les codes sociaux et moraux et à s’en moquer tant que faire se peut. L’impertinence du personnage et son esprit résolument libertaire sont particulièrement réjouissants.
Avec son ton léger et son aspect virevoltant, cet album réussit à faire oublier qu’il traite d’un monument de la littérature, avec un grand L.
Alain Lamourette
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